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Paris Normandie du 19 août 2013. Cliquer sur l'article pour l'agrandir. |
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Le Réveil Normand du 21 août 2013. Cliquer sur l'article pour l'agrandir.
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Le Réveil Normand du 21 août 2013. Cliquer sur l'article pour l'agrandir.
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La nuit fatale
Dans
la nuit du 12 au 13 août 1943, le Bomber Command fait s’envoler une
formidable armada en direction de la ville de Milan. La gare et l’usine
Alfa Romeo (qui fabrique alors des moteurs d’avions) comptent parmi les
principaux objectifs fixés.
Vers
20h30, 504 bombardiers de la RAF, dont 321 Lancaster et 183 Halifax,
reçoivent l’ordre de prendre l’air à partir de nombreux terrains
d’aviation. Parmi eux, le Halifax JD125 du 77th Squadron décolle
lourdement de sa base anglaise d’Elvington, à 20h43, et rejoint la
formation qui l’accompagnera jusqu’au-dessus de la cible désignée.
La
traversée de la Manche se déroule sans problème, ainsi que le survol
des côtes françaises. Afin de brouiller les radars allemands installés
tout au long du littoral, les aviateurs lancent régulièrement de grandes
quantités de « windows », des bandelettes de papier métallique
(au lendemain de tels raids, les Français étaient surpris de découvrir
de telles bandelettes éparpillées dans les campagnes). Néanmoins, la
Lutfwaffe est très vite mise en alerte. Bien qu’ignorant la destination
de ces vagues de bombardiers, le commandement du 1./JG2 basé à
Beaumont-le-Roger et à Évreux ordonne de s’opposer coûte que coûte aux
avions britanniques, même si les appareils requis sont des chasseurs non
adaptés au vol de nuit. Les pilotes allemands décollent et se séparent
pour mieux localiser l’adversaire.
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Pilotes allemands du 2./JG2 sur le terrain de Tricqueville en mai 1943 |
Le drame de Verneuil-sur-Avre
Le
jeudi 12 août 1943 a été une belle journée d’été pour les habitants de
Verneuil-sur-Avre. Ils profitent encore de la fraîcheur du soir
lorsqu’ils perçoivent, vers 23 heures, le sourd grondement qui signale
le passage des bombardiers en route pour l’Italie.
Un
témoin de l’époque, M. Jacques Derlon, se souvient que lorsque les
derniers aéronefs ont survolé la tour de la Madeleine, il « entendit
quelques claquements secs, suivis, dans le ciel, de l’apparition brutale
d’une boule de feu. Il la vit descendre puis disparaître à la hauteur,
lui semble-t-il, de la ferme Lambert, entre les routes de Damville et de
Breteuil. La chasse allemande avait touché un Halifax qui s’était
aussitôt enflammé » (cf. Bulletin municipal de Verneuil-sur-Avre de 2003, pp. 32-33, « Une page d’histoire vernolienne », par M. Jacques Demaire). En
effet, ayant réussi à localiser la formation aérienne, le pilote
allemand Detlef Grossfuss du 2./JG2 avait entamé une approche par
l’arrière afin d’obtenir un effet de surprise. Une fois parvenu à portée
de tir, il fit usage de ses mitrailleuses sur la meilleure cible qui se
présentait alors dans sa ligne de mire. En fut victime le Halifax II
JD125 Code « KN-A », piloté par l’officier Ernest Clinch du 77th
Squadron.
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Halifax identique à celui de Donald Dufton |
Surpris
par l’attaque, les sept membres de l’équipage n’eurent pas le temps
d’évacuer la carlingue, laquelle explosa au bout de quelques secondes.
Tous périrent. Le bombardier disloqué s’écrasa sur le territoire de la
commune de Verneuil-sur-Avre, dans la plaine Saint-Denis, tout près de
la ferme Lambert. Le pilote allemand revendiqua sa victoire à 23h17, à
3000 m d’altitude et à 1 km au nord/nord-ouest de Verneuil. Son appareil
était un chasseur de jour de type Focke-Wulf 190.
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FW-190 A-4 du 2./JG2 en mai 1943 |
Fort
de ce premier succès, il voulut poursuivre son attaque mais fut
repoussé par les mitrailleurs de bord des autres avions chargés
d’assurer la défense de la formation. Après plusieurs tentatives, il
réussit néanmoins à toucher mortellement un second Halifax, qu’il
déclara avoir abattu vers Beaune à 23h27. Le Lt Detlef Grossfuss n’en
resta pas là. Il s’illustra même, au cours des nuits suivantes, par
trois autres interceptions réussies en Normandie : à Rugles le 15 août
1943, puis à Orbec et à Houlgate le 16 août 1943.
Le
lendemain du crash de Verneuil, les Allemands interdirent l’accès aux
débris du bombardier et firent enterrer les six corps retrouvés dans le
cimetière communal de cette ville, où ils se trouvent encore.
QUI ÉTAIT DONALD DUFTON
Donald
William Dufton était né le 10 décembre 1922 à Toronto, dans la Province
canadienne de l’Ontario. Inscrit à l’école publique de Humewood de 1928
à 1937, il entreprit des études commerciales au collège de Vaughan Road
(Toronto) de 1937 à 1940.
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Printemps 1942, près de la maison familiale aux environs de Toronto.
De gauche à droite : Ruth, Donald, Joseph (père), Elisabeth, le petit James (devant Elisabeth), Warren et Joseph Dufton (fils). |
Célibataire, il s’engagea le 26 juillet 1941 dans la Royal Canadian Air Force (RCAF). Anglophone, il parlait peu le français.
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Donald en uniforme derrière la maison familiale (il ne portait pas encore l’insigne de sergent). |
Il
débuta son entraînement le 31 août 1941. En février 1942 il obtint ses
« ailes », puis compléta sa formation en Angleterre jusqu’en avril 1943.
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Donald Dufton lors de l’obtention de ses « ailes » en 1942 |
Diverses photos prises en Angleterre (1942-1943)
Il intégra ensuite le 77th Squadron de la RAF, basé à Elvington, dans le nord-est de l’Angleterre.
Après le drame qui lui coûta la vie durant la nuit du 12 au 13 août 1943, un télégramme fut envoyé à sa mère Elizabeth Georgina, le 14 août, pour l’informer que son fils était porté disparu.
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« Nous avons le regret de vous informer que votre fils matricule R/119305 Sergent Donald William Dufton est porté disparu après une opération à l’étranger, le 13 août. » |
Plus
tard, le 17 mars 1947, une autre lettre fut adressée à Mme Dufton pour
lui préciser que les services de recherche et d’enquête avaient
entre-temps déterminé le lieu de l’accident, dans un hameau connu sous
le nom de Saint-Denis et situé à 1 km au nord-est de Verneuil-sur-Avre.
L’officier de la RCAF ajoutait que le corps de son fils était enterré
dans le cimetière communal et qu’il serait prochainement exhumé pour
procéder à son identification. Mais une seconde lettre datée du 22 avril
1947 indiqua à Mme Dufton que seuls trois des sept aviateurs avaient pu
être identifiés (les sergents Griffiths, Gray et Bacon) et que des
stèles anonymes allaient être érigées afin d’honorer les autres, dont
Donald.
C'est
ainsi que les tombes des emplacements n°10, 11 et 13 du cimetière de
Verneuil-sur-Avre contiennent chacune un corps non reconnu formellement.
Les stèles qui les surmontent portent donc l’inscription suivante : An airman of 1939-1945. Known unto God (traduction : « Un aviateur de 1939-1945. Connu de Dieu »). Officiellement,
la dépouille du septième aviateur n’a pas été récupérée. On s’explique
mal pourquoi il s’agirait forcément de celle de Donald Dufton, étant
donné que trois autres corps n’ont pas pu être identifiés non plus. Il
n’en reste pas moins que, par défaut, son nom fut gravé sur le mur des
aviateurs portés disparus du Runnymede Memorial, lequel est situé à 32
km à l’ouest de Londres (avec à la clé une erreur d’un mois sur la date de son décès…). D’ailleurs, sachant bien ce qu’il
en est, son frère Joseph Henry est venu se recueillir à
Verneuil-sur-Avre en 1958, puis sa mère Elizabeth Georgina dans les
années soixante, et sa sœur Ruth Marguerite dans les années
quatre-vingt. Mais encore, le 22 août 1993, une émouvante cérémonie
s’est déroulée en présence du général Colin Adams, attaché militaire de
l’ambassade du Royaume-Uni à Paris, et de Sir John Gray, ambassadeur du
Royaume-Uni à Bruxelles : son propre père était l’un des coéquipiers de
Donald Dufton.
13
août 2010 : dévoilement et inauguration de la plaque honorant la
mémoire de Donald Dufton au cimetière de Verneuil devant les tombes de
ses coéquipiers. À gauche, tenant le drapeau canadien, ses frères MM. Joseph et James Dufton suivis de leurs épouses. À droite, ceints de leurs écharpes tricolores, Mme Olga Fontaine (représentant la mairie) et M. le député de l'Eure Guy Lefrand. Au premier plan, Fabien Perucca dépose une gerbe au nom d'Adbstar-France.
Le vendredi 13 août 2010
(photos d'Anne Belzeaux et Jean-Claude Demouy)
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À 16h30, à la Mairie, nos anciens combattants ont répondu présent |
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MM. Joseph et James Dufton, les propres frères de l'aviateur abattu en 1943 |
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Grâce aux Compagnons d'Irène, Mmes et MM. Dufton partent en Jeep... |
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pour le cimetière, où la plaque est dévoilée devant M. le député Guy Lefrand |
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La famille Dufton et leurs amis se recueillent |
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